Car vous avez besoin de persévérance, afin qu’après avoir accompli la volonté de Dieu, vous obteniez ce qui vous est promis. ( Hébreux, 10:36 )

Il m’a fallu vraiment beaucoup de persévérance pour exaucer le désir de Gian Maria et Alessandro de me faire affronter mes pires cauchemars. Il me faut vous dire qu’à cause de vertiges, je n’ai pas pu marcher pendant deux ans. Ça a été une longue période où la présence et l’absence m’ont accompagné chaque jour. La présence de la pensée et l’absence du mouvement. J’avais beaucoup de temps et pas du tout d’espace. Je ne pouvais pas devenir. Exactement la même sensation que j’ai ressenti quand j’ai passé la porte du château d’eau de l’hôpital San Camillo à Rome et ensuite pendant tout le parcours. Mais cette fois les émotions étaient inversées : beaucoup d’espace et pas du tout de temps.

Des horloges arrêtées à 10h36 tout de suite m’informent que le temps dans cet endroit ne s’est pas seulement arrêté, mais il n’existe pas. Pendant que je monte, je sens que je démarre un mécanisme coincé. Ici le temps c’est moi, car j’affecte l’espace et au début je m’en sens maître. Je commence à en voir les traces, des coulures le long des fenêtres. Je cherche ce qu’il n’y a pas mais qui aurait dû y être. Je ne le trouve pas. Je vois ce qu’il y a, mais il n’aurait pas dû y être.

Les télés émettent un sifflement, pas d’images, seulement le même sifflement que j’entends depuis des années dans mon oreille gauche. C’est inquiétant tout comme cette pensée qui m’accompagne dans les salles. Je vois un escalier impossible qui arrive au néant et une chaise en un équilibre instable parfait ; le paradoxe m’étonne. Il y a un mur érodé avec des numéros effacés qui me rendent perplexe. Quelqu’un est passé avant moi. Je vais en haut et j’arrive près d’un escalier en colimaçon. La pensée inquiétante que j’avais eu, s’est matérialisée. J’entends une musique rassurante, mais je comprends quand même qu’il faudra marcher dans le vide et sans aucune protection. Les vertiges me bloquent plusieurs fois sur les marches. Ma transpiration est froide et mon cœur bat la chamade. Je veux descendre : je l’ai bien pensé au moins trois fois.

Et alors je pense au mot testament :

Car là où il y a un testament, il est nécessaire que la mort du testateur soit constatée. ( Hébreux, 9:16 )

Ça y est. Je vais mourir. Je suis le testateur. Avec cette illumination je prends courage et je cours en haut vers la lumière pour rejoindre la promesse. Je veux le prix. Et moi, je le reçoit. La promesse a été maintenue : je suis mort, en complète solitude.

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GIAN MARIA TOSATTI
Testamento – Devozioni X
Château d’eau de L’Hôpital San Camillo, Rome
Commissaire d’exposition : Alessandro Facente